MENTON (06) – « Onze cols, on s’y colle ! »

Synthèse

  Trajet : MENTON - ST AMAND MONTROND - BOURGES

  Départements traversés :

06 - Alpes Maritimes
05 - Alpes de Haute Provence
04 - Hautes Alpes
26 - Drôme
07 - Ardèche
42 - Haute Loire
03 - Allier
18 - Cher

  Participant(s) :

MEVEL Michel
GAUTHIER Gérard

  Dates : Du 17/05/2023 au 22/05/2023

  Dénivelée : 12464 m

  Distance : 839 km

   Étapes
1Menton (06) - St-Sauveur-sur-Tinée (06)103 km2853 m
2 St-Sauveur-sur-Tinée (06) - Le-Lauzet-sur-Ubaye (04)121 km2939 m
3Le-Lauzet-sur-Ubaye (04) - Dié (26)137 km1515 m
4Dié (26) - Firminy (42)173 km2489 m
5Firminy (42) - Saint Pourçain sur Sioule (03)165 km1477 m
6Saint Pourçain sur Sioule (03) - Bourges (18)140 km1191 m

CENTRIONALE MENTON / SAINT-AMAND-MONTROND / BOURGES

 

Ce récit relate la Centrionale entre Menton et le centre géographique de la France, réalisée au cours de la seconde quinzaine de Mai 2023 avec Michel Mevel, mon compagnon de route sur plusieurs Centrionales et Eurodiagonales.

Conscients de la difficulté du profil notamment dans la partie alpestre, nous avons programmé des étapes journalières aux distances volontairement limitées. Avec une dénivelée positive de 12 464 m pour seulement 839 km, cette Centrionale jalonnée par le franchissement de 11 cols compte parmi les parcours les plus exigeants de toutes mes randonnées réalisées à ce jour, d’autant que les conditions météorologiques souvent défavorables et assez inhabituelles à cette saison se sont conjuguées pour éprouver notre volonté et notre capacité d’endurance. En contrepartie, elle est indubitablement une des plus belles balades cyclotouristes initiées par Patrick Plaine, alias « Roule toujours » l’homme aux 71 diagonales et 1 750 000 km parcourus.

Assez peu enclin à rédiger un long compte-rendu à l’issue de certaines étapes parfois physiquement éprouvantes, j’ai apporté des compléments à la compilation des publications initiales, parues sur les réseaux sociaux

 

Prologue 

Nice : sans doute un peu fatigué par notre journée passée dans les trains et les gares, je confonds le panneau d’arrivée du train de Menton avec celui du départ. Lorsque nous réalisons l’erreur, malgré une course folle sur les quais, nous sommes aux premières loges pour assister au démarrage du dernier train à destination de la ville des citrons. « Pieds nickelés un jour, pied nickelés toujours… »

Cette méprise nous vaut de regagner notre hébergement de Menton avec un taxi Uber opportunément posté sur le parvis de la gare à l’affut des étourdis dans notre genre.

Dans la petite Toyota, nous avons réussi à caser nos deux carcasses et les deux vélos démontés. Recroquevillé à l’arrière, la tête collée au ciel de toit, assis sur les sacoches, je me cramponne en sentant le cœur et l’estomac se soulever à chaque virage ; car pour éviter la maréchaussée notre chauffeur a préféré un itinéraire empruntant la moyenne corniche plutôt que l’autoroute. Sage précaution, car si l’occasion leur avait été donnée, les pandores auraient pu atteindre par ce seul contrôle leur quota mensuel de contraventions.

 

Étape 1 – Menton (06) / St-Sauveur-sur-Tinée (06) : 103 km – 2853 m

Sospel (06)

Dès les premiers tours de roue, Michel constate que son dérailleur rechigne à fonctionner correctement. En bricolant la tension du câble, le problème s’atténue un peu, mais jusqu’au terme de notre périple, la transmission se montrera souvent capricieuse. L’explication viendra beaucoup plus tard, à Tours, lorsqu’en nettoyant mon vélo, je m’apercevrai qu’en remontant nos roues la veille sur un trottoir peu éclairé de Menton, nous les avons interverties ; Michel a ce soir la gagné un pignon, source de ses déboires, tandis que moi j’en ai perdu un. Comble de malchance pour les grands consommateurs de rustines que nous sommes, jamais un crevaison arrière ne viendra nous donner l’occasion de réaliser l’erreur de montage à l’origine de cette transmission douteuse. « Pieds nickelés un jour, pieds nickelés toujours ! »  diront certains prompts à se moquer.

Michel dans l’ascension du Turini

En ce mois de mai, l’Ascension est une période toute trouvée pour tenter d’approcher le ciel. Ça commence par une mise en jambes sur les pentes du col de Castillon (707 m), pas vraiment méchant, puis par celui du Turini (1604 m) aussi exigeant à la descente qu’à la montée. Sur l’autre versant de ce second col, emportés par la vitesse, nous sommes à plusieurs reprises obligés de nous arrêter tant les mains crispées sur les freins s’endolorissent à force d’essayer de ralentir nos charrues lancées sur cette route en lacets très serrés.

En cours d’après-midi, nous remontons la vallée de la Vésubie, encombrée d’engins de travaux-publics. Ils sont à l’œuvre pour réparer les dégâts occasionnés par la tempête Alex à l’origine de la terrible inondation qui a causé la mort d’une dizaine de personnes et complètement dévasté cette vallée en 2020. Aujourd’hui, le petit torrent parait bien insignifiant, mais les maisons suspendues au bord du vide sur un sol instable entaillé à la verticale, témoignent encore plus de deux ans après de la furie des eaux. Au départ du col, au bord d’un tronçon de route récemment reconstruite, on peut même voir une maison abandonnée remplie de galets sur un demi niveau !

Saint Martin de Vésubie (06) – Dégâts de la tempête Alex 2020

Peu avant le sommet du col de Saint Martin (1500 m), pour corser l’ascension dont la difficulté est presque du même tonneau que celle du Turini, une pluie fine nous oblige à bâcher. Pressentant la menace de sa persistance et par crainte de chuter sur cette chaussée mouillée toute en virages, nous décidons de nous poser pour la nuit à Saint Sauveur de Tinée dans l’unique hôtel du village.

 

 

 

 

 

Étape 2 – St-Sauveur-sur-Tinée / Le-Lauzet-sur-Ubaye (04) : 121 km – 2939 m

Route du col de la Couillole – ROUBION (06)

Après une première journée pour le moins ardue, la difficulté monte d’un cran. À peine un kilomètre à plat pour atteindre le pont sur la Tinée et déjà la route s’élève. Avec ses 1678 m le col de la Couillolle (pas vraiment fait pour des c… molles) nous oblige à taper dans le dur : il faut d’emblée avaler  presque 1200 m de dénivelée avec des rampes dont la pente flirte constamment avec les 7 ou 8%. La difficulté est heureusement compensée par des vues superbes vers la vallée de la Tinée partiellement embrumée par une nappe de vapeurs matinales. Un peu plus haut, sur la route posée à flanc de montagne et parsemée de nombreux tunnels, apparaît Roubion. En contrebas du village, depuis la route en corniche, on découvre les maisons accrochées en haut d’une falaise rocheuse, puis après avoir déroulé un empilement de lacets et d’épingles on finit par les surplomber, preuve tangible que ce moulinage besogneux n’est pas aussi vain qu’il parait.  

Après cet effort, le deuxième col du jour, « Sainte Anne » (1551m) passe presque inaperçu d’autant qu’un troisième, le « col du Quartier » (1673 m) donnant accès au domaine skiable de la station de Valberg ne tarde guère. De là, sur une douzaine de kilomètres, par une belle route découvrant de larges panoramas sur des sommets lointains encore enneigés, on dévale à bride abattue une descente plongeant de presque 900 m vers Guillaumes. Au cours de la halte dans ce village où existent quelques commerces, je leste les sacoches d’une boule de pain, de quelques fruits et de victuailles consistantes. Il est maintenant temps de s’attaquer au plat de résistance du jour, sa majesté « la Cayolle » notre quatrième col du jour qui, du haut de ses 2324 m, nous défie avec la promesse de plus de 1600 m d’ascension continue sur 21 km.  

Col de la Cayolle – Cascade de l’Aiglière

Jusqu’aux sources du Var, à proximité du village d’Entraumes, le profil se laisse grignoter. Au-delà il se redresse sérieusement nous laissant pendant ce pédalage laborieux tout loisir pour admirer les paysages du Mercantour, de plus en plus sauvages au fur et à mesure que la route s’élève. Sur un bacon naturel dominant la vallée du Var, la pause casse-croûte, face à l’impressionnante cascade de l’Aiglière est bienvenue. À l’approche du hameau d’Estenc, pour ne pas désespérer les cyclistes à la peine, les panneaux routiers se gardent bien d’indiquer la distance nous séparant du col mais signalent en plusieurs endroits la présence possible de marmottes.

Au sommet de la Cayolle, il fait gris, le vent est presque froid, quelques plaques de neige subsistent encore.  Même si les marmottes sifflent malicieusement comme pour nous signifier que le contrat est rempli ou pour nous inviter à rester un peu, nous ne nous attardons guère. Il ne reste alors plus qu’à nous laisser glisser sur près de 25 km sur cette route déserte heureusement moins pentue que sur l’autre versant. Elle laisse le temps de contempler les paysages magnifiques de la vallée du Bachelard, un des grands bonheurs de ma diagonale Dunkerque / Menton  où je l’avais remontée au jour naissant. Dans le hameau de Fours, je passe sans m’arrêter devant une auberge aux volets fermés. Elle ravive en moi un très beau souvenir que j’évoquerai à la fin ce récit.

Descente vers Guillaumes (06)

Étape 3 – Le Lauzet-sur-Ubaye / Dié (26) : 137 km – 1515 m

 de g. à dr. : M. Mevel –  J.J. Treguer – R. Isoard – G. Gauthier    

La fraicheur inhabituelle en cette saison nous surprend. Elle nous oblige à de fréquentes séquences d’habillage et de déshabillage. L’étape du jour emprunte des chemins connus de nombreux diagonalistes : nous longeons la vallée de l’Ubaye par la route surplombant le lac de Serre-Ponçon, puis brièvement celle de la vallée de la Durance avant de bifurquer vers Gap.

 

Si je vous dis « Isoard », vous voyez le paysage lunaire de la Casse déserte et vous penserez sans doute que non seulement j’orthographie mal le nom de ce col légendaire mais aussi qu’en cheminant en direction de Gap, je m’égare… Mais « Que nenni ! » lorsque je pense Isoard avec un S, c’est bien à Gap que je me transporte car nous ne pouvions pas manquer de rendre visite à  ce diagonaliste hors pair et ami commun, Robert Isoard.

Avec la complicité de son épouse, qui pour garder le secret m’a fait passer pour un de ces opportuns marchands de pompe à chaleur, nous avons manigancé la surprise de cette rencontre. C’est le moins que je puisse faire pour celui qui en 2014, parti de Gap, n’a pas hésité à faire 200 km pour venir me cueillir au sommet du col de la Bonette-Restefond à plus de 2700 m d’altitude. Déjà en 2012, sur une autre diagonale, Robert était venu me surprendre à l’aube à la sortie de Sisteron. Puis au sommet du col d’Espreaux, il avait sorti de sa sacoche une bouteille thermos pour une pause-café, avant que nous nous remettions en selle pour gravir le col de Festre où nos routes se séparaient. Ni l’un, ni l’autre, malgré la distance et les années, n’avons oublié ces brefs moments d’échange et d’amitié.

Et lorsque ce matin Robert nous a aperçu plantés au pied de son escalier, son émotion était palpable, d’autant que des ennuis de santé l’ont écarté définitivement de l’activité cyclotouriste en groupe. Néanmoins Robert, en diagonaliste obstiné, ne s’est jamais résigné à lâcher le guidon. En adoptant le tricycle, qu’il enfourche désormais deux fois par semaine, il continue à rouler presque toute l’année. Bel exemple de ténacité pour ce diagonaliste maintenant octogénaire qui depuis toujours a banni de son vocabulaire les mots « abandon » et « renoncement ». Nos retrouvailles ont été aussi brèves que chaleureuses. Grâce à son épouse très attentionnée, un autre illustre diagonaliste, le randonneur gapois, Jean-Jacques Treguer est venu se joindre à ce trio amical. À nous quatre, malgré l’âge et la bedaine de presque tous, nous pesions aussi 71 diagonales : 24 pour Robert, 20 pour Jean-Jacques, 9 pour Michel et le reste pour moi. Autant dire qu’avec ces 71 traversées de la France, la matière pour évoquer beaucoup de souvenirs ne manquait pas. Sachant notre temps compté, Robert un brin philosophe, a conclu notre entrevue avec cette phrase révélatrice d’une pensée partagée par les quatre anciens jeunes un moment rassemblés : « Les projets valent mieux que les souvenirs ! ». Cette petite heure passée ensemble restera un des temps forts de cette Centrionale.

Route du Col de Grimone (26)

Après une progression assez pénible sur une route bruyante et « camionneuse » en long faux plat montant où le vent contraire s’acharne un long moment contre nous, débute l’ascension du col de Grimone (1318 m) atteint cette fois sans trop de difficultés. Dans la descente du col, nous traversons « la Révolte » un petit hameau du village de « Glandage » où je me serais volontiers établi tant ces deux noms m’inspirent. Puis nous découvrons à quelques encablures de Chatillon-en-Diois (26) les impressionnantes gorges de Gat dont les parois rocheuses verticales laissent à peine passer la route et le ruisseau. Décidément la France ne finira jamais de m’étonner.

 

 

 

 

Étape 4 – Dié / Firminy (42) : 173 km – 2489 m

Pour rester dans le même registre, nous nous offrons encore une belle journée de grimpette, à peine entrecoupée par le tronçon doucement vallonné qui franchit le sillon rhodanien.

Le col de la Croix (745 m), premier de la journée, n’en est pas vraiment un puisque le soir même je me souviens à peine l’avoir gravi. Il est vrai que l’examen de la carte du secteur, à cheval sur la Drôme et l’Isère, révèle une multitude de cols, mais je ne suis pas certain qu’un géographe rigoureux les qualifierait ainsi. Vers le quarantième kilomètre, au nord-ouest de Dié, nous atteignons le second au menu du jour. Ce « col de de l’aviateur » (842 m) un peu plus exigeant que le précédent est aussi nommé « col Jérôme Cavalli » en l’honneur d’un enfant du pays devenu un as de l’aviation qui s’est illustré pendant les combats aériens de la seconde guerre mondiale avant d’être tué au sol par l’ennemi.

Transis par la froidure matinale et enveloppés par le brouillard qui masque jusqu’au dernier moment la stèle commémorative dédiée à ce héros, nous nous arretons très brièvement au sommet pour nous couvrir avant de repartir pour tenter de nous soustraire à l’humidité pénétrante.

Nous franchissons le Rhône à Sarras, puis remontons vers Annonay (07) où nous pointons avant de repartir vers Bourg-Argental. De là, il reste à encore à gravir le col de la République (1161 m), cher à Vélocio. Heureusement la pente assez régulière ne pèse pas trop en fin de journée. Mais une demi-heure avant le sommet la pluie, longtemps menaçante, finit par tomber et devient rapidement intense. Dans l’espoir de la voir cesser nous optons pour une pause allongée le temps d’un repas à Saint-Genest-Malifaux (42). Comme la pluie reste toujours aussi drue, nous devons nous résigner à nous remettre en selle au crépuscule pour une vingtaine de kilomètres. Heureusement, la route globalement descendante abrège notre chevauchée jusqu’à Firminy atteint au moment où la pluie cesse enfin. 

Firminy (42) – L’œuvre de Le Corbusier, classée monument historique

Une ultime et très rude montée nous conduit au pied de notre hébergement, dans l’un des 414 appartements de cet immeuble conçu par Le Corbusier. Cette « œuvre architecturale » classée monument historique mesure 130 m de longueur pour une hauteur de 51 m.  Sans dénier le génie qu’on prête à l’architecte, je n’apprécie guère cette forme de gigantisme qui à l’époque tenait lieu de modernité. Aujourd’hui à peine la moitié des logements, pourtant fort agréables, est occupée. Parvenus dans l’entrée principale vaste comme un hall de gare, nous hésitons devant les quatre cages d’ascenseur, faute de comprendre lequel pourrait nous conduire à bon port. Heureusement un « indigène » nous explique les codes de couleur permettant d’atteindre notre antre, ou plutôt notre case, au cœur du clapier en béton. Nous devons encore parcourir une soixantaine de mètres dans un couloir interminable bordé d’une multitude de portes aux couleurs claquantes avant de pénétrer dans un appartement dominant la ville illuminant la nuit. L’ambiance chaleureuse et la conception harmonieuse de ce duplex ne manquent pas de nous surprendre. Comment imaginer que puisse exister un cocon aussi douillet dans cette monstruosité architecturale cumulant autant de froideur et de laideur ? C’est peut-être là que réside en partie le talent de Le Corbusier.

 

Étape 5 – Firminy / Saint Pourçain sur Sioule (03) : 165 km – 1477m

Comme pour faire un pied de nez au célèbre architecte, nous rejoignons les ascenseurs en pédalant dans l’immense couloir.

Après nos premiers jours où malgré l’effort le plaisir était presque constant, cette journée pourrait se résumer à un morne pédalage consistant à abattre des kilomètres sur les routes maintes fois parcourues de la Loire moyenne et de la plaine du Forez. Heureusement, à mi-journée, dans les environs de Saint Just-en-Chevalet (42), le parcours devient un peu plus vallonné ; Les monts de la Madeleine et le « col du beau Louis » (823 m), dernier col répertorié de notre périple, nous redonnent un peu d’ardeur pour pédaler. Puis sans vraiment peiner, nous nous laissons glisser sur les pentes douces de la vallée du Sichon dont l’attrait parait moindre dans la fraicheur de cet après-midi teintée de grisaille.

Dans le désert dominical de la petite ville de Cusset (03), nous peinons à trouver un endroit ouvert pour pointer. Attablés un court moment derrière des haut-parleurs saturés par une le brame d’une cantatrice braillarde, applaudie par un public vraiment très indulgent, nous nous hâtons pour ingurgiter nos consommations et déguerpir au plus vite. Pour une fois, je goûte au bonheur d’être presque sourd ! Une trentaine de kilomètres plus loin nous atteignons Saint-Pourçain-sur-Sioule et le logis familial de Michel que l’initiateur des Centrionales, le défunt Patrick Plaine alias « le Coyote » a eu la bonne idée de placer sur notre route. Ce soir Jacqueline en cycliste dévouée pour son compagnon et le « compagnon de son compagnon» est aux fourneaux . Assez satisfaits qu’elle les complimente pour l’effort accompli, les deux affreux machos glandent royalement, les pieds sous la table. Le courage n’est pas toujours là où on pourrait croire !    

 

Étape 6 – St-Pourçain-sur-Sioule / St-Amand-Montrond / Bourges (18) : 140 km -1191 m

St-Amand-Montrond (18) – Centrionale arrosée, vêtements au séchage…

Pour agrémenter cette dernière étape ou pour tenter de calmer notre « kilométrophagie », à mi-parcours le ciel soudain s’obscurcit au point de devenir presque noir. Le tonnerre gronde, des éclairs zèbrent le ciel suivis de craquements terribles puis l’orage se déchaine, déversant des trombes d’eau sur tout le département de l’Allier et accessoirement sur deux cyclistes perdus dans la campagne bourbonnaise. L’évènement météorologique est tel que la télévision nationale évoque ce déluge dans les faits marquant du journal de 20 heures. Preuve, s’il en est besoin, que les journalistes n’ont pas toujours beaucoup de matière pour cette messe vespérale. Notons au passage que cette information capitale aurait été plus complète si les journaleux avaient conté l’incroyable endurance de deux vaillants cyclotouristes désarmés bataillant contre les éléments sans jamais faiblir !

Vers midi, notre Centrionale est à ranger au rayon des souvenirs.

Pour Michel, la randonnée se conclut au bar « le Chiquito » à Saint-Amand-Montrond, lieu de notre pointage final. Dans ce haut-lieu du cyclotourisme, nous arrosons cette Centrionale, pourtant déjà bien arrosée, en compagnie de Jacqueline la plus fervente supportrice de Michel venue le rejoindre ici. Pour moi la balade se prolonge d’une cinquantaine de kilomètres jusqu’à Bourges où je prends le train pour rejoindre mes pénates tourangeaux.

 

Une dernière petite anecdote en lien avec notre Centrionale :

En Juin 2017, sur la dernière étape de la diagonale Dunkerque / Menton, aux premières heures du jour, venant de la vallée de l’Ubaye, alors que débutait la longue ascension du versant nord du col de la Cayolle (26 km), dans un hameau de la commune d’Uvernet-Fours, occupé par quelques bergers et par presqu’autant de marmottes, j’ai eu la surprise de trouver sur ma route un café-restaurant ouvert alors qu’il n’était pas encore 7 heures. Pénétrant dans ces lieux dont le décor semblait figé depuis les années trente, une dame très âgée, mais encore alerte, me servit un café. Elle fit avec ce randonneur matinal un brin de causette teintée d’un aimable accent provençal.

Au cours de cette dernière Centrionale en mai 2023, lors d’une pause dans le bar d’Estenc sur le versant sud, un peu avant le sommet du col de la Cayolle, avec la patronne du bar j’ai évoqué cette brève rencontre. Cette dame m’indiqua que j’avais eu le privilège de rencontrer Pauline Arnaud, une personnalité exceptionnelle, une restauratrice connue bien au-delà de sa vallée perdue. Par déduction, je compris que ce jour de 2017, la barmaid dont le charme ne m’avait pas échappé accusait 96 printemps.

Mon interlocutrice m’a raconté que Pauline, dont les ravioles de l’Ubaye étaient réputées bien au-delà des Alpes, avait continué son activité jusqu’à 97 ans avant de décéder à l’âge de 101 ans. En fouillant un peu sur Internet, j’ai découvert une interview de cette dame étonnante qui, bien que notre rencontre n’ait durée que le temps d’un café, m’avait inspiré quelques lignes dans le compte-rendu de cette Diagonale. Dans la descente de la Cayolle, en passant devant son café-restaurant désormais à jamais fermé, j’ai eu une pensée pour cette femme dont j’avais sans la connaitre perçu le sens humain et la forte personnalité.

Si vous souhaitez retrouver le récit de cette diagonale de 2017 où je relatais cette rencontre furtive, voici le lien (étape Espinasses – Menton)

https://www.gegediagonaliste.fr/2017-diagonale-dunkerque-menton

 

Si vous êtes curieux de découvrir cette dame étonnante, voici un lien vers le reportage où elle apparaît :

https://www.likeradio.fr/actu/2020/06/13/magnifique-documentaire-tradition-pates-ubaye-de-ravioles-de-fours

 

 




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