2010 – Diagonale BREST / MENTON

Synthèse

  Trajet : Brest / Menton

  Délai : 116 h

  Dates : du 23 au 27 juin 2010
  Distance : 1380 km
  Dénivelée : 9360 m
  Participants :

Bellamy Jean-Claude

Paulmier Francis

Gauthier Gérard

  Homologation FFCT : 10-155
    Étapes
1 BREST (29) / CANDÉ (49) 328 km 2470 m
2 CANDÉ / SAINT-DÉSIRÉ (03) 327 km 1270 m
3 SAINT-DÉSIRÉ / BOURG-ARGENTAL (42) 271 km 2725 m
4 BOURG-ARGENTAL / VOLONNE (04) 249 km 1515 m
5 VOLONNE / MENTON (06) 205 km 1380 m

 


  Feuille de route : Ouvrir  Télécharger

Crêpe à la saucisse et pissaladière…

Si je vous parle d’un melon abandonné volontairement par un cycliste, qui finit par être dévoré par un autre cycliste (pas le cycliste, mais le melon), des sandales de l’abbé Pierre, de bêtes à cornes jouant à la roulette russe, je vois déjà poindre l’inquiétude du lecteur.

Si je poursuis en évoquant Clemenceau (pas le bateau, mais l’illustre homme d’état), la crêpe à la saucisse, mon beau frère et sa sœur qui par ailleurs se trouve être mon épouse, les acclamations de supporters, et si j’affirme que cette énumération délirante appartient à une seule et même histoire, vous vous demanderez à juste titre si le narrateur jouit encore de toutes ses facultés mentales.

Et pourtant, le lien existe, ça s’appelle une Diagonale, celle que d’aucuns désignent « la Royale », j’ai nommé « Brest / Menton ».

 

 

1er jour : BREST (Finistère) / CANDÉ (Maine-&-Loire) 

328 km – Dénivelée 2470 m


Pour le trio, la diagonale commence par une nuit d’été à Brest, ville éventrée par les travaux du tramway.

Sur cette même route, Christian notre initiateur en diagonale, parti la veille au soir en solitaire nous devance.

C’est le début d’une longue poursuite qui durera près de quatre jours.

Malgré notre modeste carrière de diagonalistes et bien que nous n’ayons pas encore mémorisé le double étiquetage des pancartes, le parcours breton a un air de déjà vu.

Mais à ce petit jeu, je ne suis pas certain que le plus chevronné des diagonalistes saurait reconnaître le parcours du jour énoncé en langue celtique et dans le désordre : Josilin – Baen Veur – Anast – Landerney – Karaez-Plougêr – Brest – Silieg – Pondivi – Gwipavaz – Ploermael – Gwipr – Sizun – Kastell-Briant.

Pour vous aider un peu, voici quelques indices : alors que le soleil est au zénith, nous rencontrons Gilbert LE CORRE, notre premier sariste. Gilbert nous attend à la sortie d’une ville nommée un temps Napoléonville, puis Bourbonville avant de retrouver son nom actuel. Je vous laisse réfléchir, pendant que nous prenons le café invité par notre ami sariste …à quelques encablures de Pontivy.

Peu après Josselin, le trio devient quatuor lorsque Jean-Claude SALMON autre sariste nous rejoint. L’équipe ainsi constituée, composée pour moitié de Jean-Claude, roule jusqu’à Guipry. Là, nous franchissons La Vilaine et nous dégustons une crêpe à la saucisse que notre accompagnateur a tenu à nous offrir avant de nous séparer.

Encore quelques heures de route, coupées par une halte repas à Châteaubriant et nous arrivons à la nuit tombante à Candé, village désert, dans un hôtel où nous sommes les seuls occupants.

Guipry – Ile et Vilaine De gauche à droite : F. Paulmier – J.C. Salmon (sariste) – G. Gauthier – J.C. Bellamy
Comme les caresses avant l’amour, la bière est un prélude indispensable avant de déguster une crêpe à la saucisse.

 

2ème jour :  CANDÉ (Maine-&-Loire) / SAINT-DÉSIRÉ (Allier) 

327 km – Dénivelée 1270 m


La journée débute tôt pour l’épicier de Candé. Tandis qu’il prépare son étal, on répare nos pédales.

S’il est vrai que le commerçant est très matinal, l’histoire des pédales n’est qu’une invention, justifiée par la seule envie de commettre une rime calamiteuse !

Peu après Bécon-les-Granits nous retrouvons Jean-Claude CHABIRAND, sariste à ses heures, heureux diagonaliste et eurodiagonaliste, venu à notre rencontre pour nous aider à contourner Angers par Bouchemaine et la levée de Sainte-Gemmes.

Ce chemin en bordure de l’Authion bordé par deux alignements d’arbres centenaires évoque pour nous le final des dernières 24 heures d’Angers, une randonnée cycliste au long cours pour laquelle Jean-Claude et son équipe des randonneurs d’Anjou se dévouent depuis de nombreuses années.

Notre sariste nous quitte après avoir levé une belle poule…Décidément, je m’embrouille, je voulais dire « nous quitte sur la levée de la belle poule » sur la rive nord de la Loire. Encore une contrepèterie fâcheuse qu’il vaudrait mieux mettre à la « poule belle »… À moins que ce ne soit à la poubelle !

La Loire angevine vaut bien la Loire tourangelle pourtant si chère à notre cœur. Du haut de la levée, nous contemplons avec un réel bonheur ce paysage grandiose et paisible à la fois.

Vers Saint-Clément-des Levées, Joël LAMY et Jean Philippe BOLMONT, coéquipiers de notre club nous rejoignent ; avec eux nous vivons ce moment symbolique et fort d’une Diagonale : le passage d’un grand fleuve français.

Aujourd’hui, c’est La Loire que nous franchissons par ce curieux pont cage de Montsoreau. L’enchevêtrement des poutrelles métalliques de l’ouvrage découpe avec un effet de kaléidoscope le fleuve royal en une mosaïque de losanges colorés où le sable alterne avec l’eau, la pierre de tuffeau avec la lumière d’un ciel d’été.

La balade avec nos habituels compagnons de randonnée donne un air de parenthèse à la Diagonale, tant le paysage et les lieux nous sont familiers.

Le trio de Brest/Menton après le passage de la LOIRE à Montsoreau – Maine-&-Loire

Candes-Saint-Martin et sa collégiale, les chemins bucoliques des bords de La Vienne et la bonne ville de Chinon. Toujours en devisant, nous progressons vers l’Île-Bouchard en traversant les vignobles dont nous connaissons la valeur pour en avoir si souvent goûté les fruits pressés et embouteillés.

En bonne compagnie la route paraît plus courte ; et c’est ainsi que nous nous retrouvons attablés à cinq dans un restaurant routier de la Celle-Saint-Avant, alors que nos comparses avaient prévu de rebrousser chemin au moins vingt kilomètres plus tôt.

En début d’après-midi, la reprise est plus laborieuse. Le vent que nous avions oublié dans notre pédalée à cinq semble plus présent lorsqu’il contre le trio. Mais on avance quand même en se faufilant par la vallée de la Creuse via Descartes puis celle de la Claise que nous longeons jusqu’au Grand-Pressigny. Dans ce haut lieu de la préhistoire, les magdaléniens surent produire en quantité le couteau à lame de silex, ancêtre de  « l’Opinel », outil indispensable du cyclotouriste.

Au-delà de Preuilly-sur-Claise, nous quittons le pays de cocagne, notre Touraine, pour entrer dans le Berry. Ça s’annonce d’abord gentiment avec la Brenne toute plate et parsemée d’étangs. Puis ça se complique assez rapidement avec une route au revêtement rugueux qui met à rude épreuve machines et carcasses.

Saint-Gaultier (j’ai peine à croire que ça existe [1]) est un saint de mauvaise augure, car à partir de là, nous aurons la vie dure. C’en est fini des routes tranquilles de la Brenne, il faut maintenant affronter les interminables toboggans berrichons enfantés par des montagnes russes. Et ça monte et ça descend, et ça remonte et ça redescend encore. Et ça dure… et c’est dur !

Neuvy-Saint-Sépulcre, drôle de nom … Sans doute à cause de cette drôle d’église toute ronde au pied d’une redoutable côte, précédée elle-même par une côte et suivie par d’autres côtes !

Entre La-Châtre et Châteaumeillant alors que nous prenons un peu de repos sur une aire d’arrêt, un retraité s’approche et engage la conversation. Les plaques de cadre l’intriguent ; il veut connaître la nature de notre randonnée, le kilométrage journalier, le parcours et la durée du périple, nos conditions d’hébergement.

Quelques explications suffisent à le rassurer : il sait que ce soir nous ne nous ne dormirons pas sous un pont, mais dans un gîte à quelque distance de Culan. Alors pour témoigner l’intérêt qu’il porte à notre virée, l’ancien cyclotouriste, car c’en est un, veut nous offrir une bouteille de vin qu’il transporte dans sa voiture. Nous finissons par le persuader de la boire à notre santé…

Enfin, à la nuit tombée nous arrivons à destination au bien nommé village de Saint-Désiré, dans un gîte où mes deux compagnons ont déjà séjourné.

Jean-Claude, alias « Clemenceau » est particulièrement choyé par la maîtresse des lieux. Séduite par ses moustaches et son allure de vainqueur, cette ancienne institutrice l’a baptisé ainsi lors de son précédent passage.  Clemenceau et sa suite présidentielle sont reçus avec tous les égards dus au rang de l’auguste personnage.

Occupé à rassembler l’incroyable barda qui lestera demain sa monture, il tarde à se coucher :

  • « Que dis-tu Jean-Claude ? »
  • « Auguste… Non, je ne t’ai pas traité de clown, éteins la lumière et dors, car demain nous pédalerons ».

 

3ème jour :  SAINT-DÉSIRÉ (Allier) / BOURG-ARGENTAL (Loire) 

271 km – Dénivelée 2725 m


Le lever du jour sur la campagne laisse entrevoir le menu de la matinée : entre nous et l’horizon : au premier plan … des bosses, au second plan … des bosses et derrière les bosses… encore des bosses.

Un peu plus tard, quelque part entre Cosne-d’Allier et Saint-Pourçain-sur-Sioule, le dernier sariste de notre périple nous rejoint. Michel MEVEL s’excuse d’être venu motorisé à notre rencontre pour cause de départ imminent sur Bordeaux-Paris.

Après Cusset atteint vers midi, nous nous faufilons sous les ombrages de la plaisante vallée du Sichon. La route en faux plat montant, se plaque sur le cours capricieux du ruisseau sautillant de rocher en rocher sous une voûte d’arbres.

Nous apprécions la relative fraîcheur des lieux pour le pique nique de la mi-journée.

Au-delà d’Aronnes la route se cabre pour partir à l’assaut du col du Beau Louis. Bien que la pente et le dénivelé soient modestes (470 m sur 17 km) l’ascension nous semble plus difficile qu’elle ne devrait l’être, mais la chaleur, les quelques 800 km déjà parcourus et l’accumulation des bosses commencent à peser.

Heureusement, on finit par basculer et c’est par une longue descente que nous nous portons vers Saint-Priest-la-Prugne, puis Saint-Just-en-Chevalet.

Nous retrouvons une route tranquille déjà empruntée lors d’une flèche pascale, qui nous mène vers Saint-Germain-Laval jusqu’à Saint-Just – Saint-Rambert par la plaine du Forez.

Pour la seconde fois de notre périple nous traversons la Loire.

À Saint-Genest-Lerpt, dans la banlieue de Saint-Étienne, la technologie doit normalement nous guider sans l’ombre d’une hésitation vers le Rond-point Véloccio, au pied du col de la République.

Mais cette fois, l’objet se montre récalcitrant. Il peine à détecter de temps à autre deux ou trois satellites, puis pas vraiment décidé à travailler, il se tait… Gégépéesse est en grève !

Dépourvus de boussole et de sextant, avec une carte insuffisamment détaillée nous revenons à une méthode éprouvée : questionner le quidam de passage.

Ainsi renseignés, nous nous embarquons pour une visite des zones industrielles et commerciales des hauteurs de Saint-Etienne avant d’arriver dans un quartier aux immeubles délabrés.

Histoire de se défouler, les excités du vendredi soir font crisser les pneus.

Heureusement, la ville oppressante à la nuit tombante disparaît au bout de quelques virages alors que nous nous élevons tant bien que mal sur la partie la plus difficile du col, la montée vers Planfroy.

Au-delà, la pente, atténuée par la nuit, paraît plus douce. Chacun monte à son rythme à faible distance les uns des autres.

Au passage de La République j’apprécie le nom facétieux apposé sur l’école communale « l’École de La République ». Ainsi dans ce hameau perdu au milieu des sapins, les écoliers du lieu encore candides peuvent croire que des politiciens sérieux sont parfois prêts à s’écharper pour leur modeste école dans le grand cirque des médias.

Nous atteignons enfin le Col du Grand Bois [2]. Nous souhaitons un rapide bonsoir à Monsieur Velocio et, à peine enfilées manchettes et jambières, nous dévalons vers Bourg-Argental distant d’une douzaine de kilomètres.

Lors de la descente, à la seule lueur de nos éclairages, les mains endolories à force de freiner, je ne peux m’empêcher de penser à l’aspect incongru de notre équipée : descendre un col à tombeau ouvert la nuit n’est ni ordinaire, ni raisonnable. À plus forte raison lorsque l’un des cyclistes est septuagénaire !

J’en conclus que la passion l’emporte toujours sur la raison et c’est tant mieux ainsi.

 

4ème jour :  BOURG-ARGENTAL (Loire) / VOLONNE (Alpes-de-Haute-Provence)

249 km – Dénivelée 1515 m


La journée commence par une longue glissade de près de 25 km vers la vallée du Rhône. La route est si facile que par moment, il nous arrive de prendre en chasse un cycliste parti pour sa sortie hebdomadaire. Même si le chassé ignore tout du chasseur, lui coller au train à une allure soutenue, après quelques 1000 km au compteur est à la fois rassurant et jouissif.

Quand de surcroît le soleil vous accompagne et que le vent est portant, le diagonaliste se croit alors capable d’aller au bout du monde. Après tout, ça ne fait de mal à personne et c’est bon pour le moral.

Lors de la halte à Tournon, nous évoquons la progression de Christian dont Francis et Jean-Claude sont régulièrement informés par téléphone. Entreprendre un tel périple en solitaire, nécessite un mental d’acier surtout lorsque la mécanique humaine se montre récalcitrante. Il faut oser entreprendre Brest/Tours d’une seule traite et beaucoup de courage pour repartir après avoir retrouvé le temps d’une courte halte le confort de la maison. Chapeau bas !

Autre temps fort du voyage, la traversée du Rhône à hauteur de l’Étoile.

Toujours à bonne allure sur un parcours roulant et à peine chahuté, nous rejoignons Crest pour entreprendre la remontée de la Drôme.

Dans les lointains, se profilent déjà les reliefs du Diois, mais à chaque fois que la vallée semble se refermer, un passage apparaît sur la petite route qui louvoie entre champs de lavande et vergers.

Nous pointons à la cave coopérative de Die. Là un cycliste devenu pour un temps touriste se renseigne sur notre périple ; les plaques de cadre suscitent toujours autant d’intérêt et nous ne manquons jamais de nous comporter en prosélyte pour agrandir la famille des diagonalistes, autant que faire se peut .

La conversation va bon train, et lorsque le cyclo découvre tout à coup mes sandales, il s’exclame : « Bon dieu, mais c’est l‘abbé Pierre ! ». Nous rions.

Luc en Diois – Drôme
À la claire fontaine, j’ai trouvé l’eau si fraîche que je m’y suis baigné …

À Luc-en-Diois nous faisons halte sur la place du village pour remplir nos bidons avec l’eau fraîche coulant d’une fontaine en pierre. L’eau limpide réveille nos instincts de gamins : Francis et Jean-Claude s’aspergent gentiment tandis que je me trempe telle une naïade (de 85 kg tout de même) à l’eau de la claire fontaine.

À la sortie du bourg, la route s’élève et tournoie autour d’un étonnant chaos rocheux « Le Claps », détaché de la montagne quelques siècles plus tôt. L’amoncellement a fermé la vallée et a contribué à créer un lac. Et, pour compléter ce décor si inattendu, un viaduc ferroviaire en sortie d’un tunnel barre le paysage parsemé de blocs gigantesques.

De peur d’être transformés en sujets de plomb, nous redoublons d’ardeur pour nous soustraire à une soudaine envie du maquettiste de parfaire son œuvre…

Pour mériter le repos, il nous faut d’abord gravir le col de Cabre, par une route escarpée, ombragée de ci de là par des pins.

Après avoir passé le col, la route s’annonce facile, en descente quasi continue jusqu’à Sisteron

Mais ce soir là, l’espoir d’une longue nuit de repos est soudain brisé par l’orage qui se déchaîne quelque part vers Eyguians. Réfugiés d’abord sous un arbre pour bâcher alors que nous sommes déjà trempés, nous décidons de poursuivre sous la pluie battante pour trouver un véritable abri.

Pour échapper à la pluie si forte qu’on croirait des grêlons, nous décidons de rejoindre un restaurant ouvert sept jours sur sept à la sortie de Laragnes-Montéglin. Mais cette publicité mensongère nous vaut d’attendre la fin de l’orage sous l’auvent d’un petit centre commercial.

Profitant d’une accalmie nous poursuivons jusqu’à Mison où nous trouvons refuge dans un restaurant. Pendant le repas l’orage se calme enfin et nous constatons en rejoignant Sisteron que la vallée de la Durance a échappé à l’orage. Quelques kilomètres de plus auraient suffi pour que nous dormions enfin une longue nuit

Mais à Volonne, notre hôtesse d’un soir devra nous attendre jusqu’à 23 heures.

 

5ème jour :  VOLONNE (Alpes-de-Haute-Provence) / MENTON (Alpes-Maritimes) 

205 km – Dénivelée 1380 m


« Diagonaliser » nous donne souvent l’occasion de nous rapprocher de la nature et d’observer le monde animal. Si nous connaissons bien sûr le hérisson kamikaze, toujours prêt à sacrifier ses piquants et sa vie pour s’attaquer aux pneus, nous ignorions jusqu’à ce jour le tempérament intrépide des escargots.

Vers Malijaï, les petits gris assurés que la roulette russe est moins risquée à six heures du matin et persuadés que l’herbe est plus verte de l’autre coté de la route, n’hésitent pas à tenter la folle traversée de la route Napoléon.

Nous quittons la vallée de la Bléone vers la Chaffaut-Saint-Jurson pour rejoindre Chateauredon et Barrème par une vallée sauvage ou par endroits le vent violent s’engouffre entre les falaises.

À Barrême, alors que je fais un sort à deux parts de pissaladière encore chaude, nous prenons des nouvelles de Christian. Pour aiguiser notre curiosité, il nous dit avoir laissé un présent comestible au pied de la pancarte du col des Robines.

Col de Toutes Aures – Alpes de Haute Provence. J’ai beau fouiner au pied de la pancarte du col de Toutes Aures, rien à manger cette fois…

Promesse tenue, au sommet du col, nous trouvons le melon blanc que Christian a laissé la veille au soir. La voracité du plus corpulent des trois cyclotouristes a finalement raison de cette cucurbitacée à fort goût de courge.

La route Napoléon nous conduit jusqu’à Saint-André-des-Alpes où nous découvrons les eaux turquoise du lac de Castillon . Nous le  longeons un moment avant d’entreprendre l’ascension du col de Toutes Aures.

Jean-Claude, qui souffre de la « tamponite » [3], parvient à nous détourner jusqu’à Annot pour recueillir le précieux sésame.

Le pont de la reine Jeanne (gorges de Charenche) – Alpes-de-Haute-Provence

Notre dernier jour de randonnée se passe dans des paysages d’une beauté saisissante de roches ravinées par l’érosion, de défilés étroits qui laissent à peine le passage de la route et de la rivière.

Chaque virage révèle une curiosité : la Roche percée au travers de laquelle la route se faufile, le mystérieux pont de la Reine Jeanne dont l’unique arche ne semble avoir été posée ici que pour rehausser la beauté du site ou Entrevaux village fortifié dressé sur un éperon rocheux ceinturé par le Var .

Après Puget -Theniers, halte de la mi-journée, la vallée du Var s’élargit. Pour approcher Nice, nous devons maintenant nous jeter dans l’enfer automobile d’une route à deux fois deux voies. Souvent, elle emprunte de longs tunnels où le bruit et la semi-obscurité amplifient le sentiment d’insécurité.

Entrevaux – vallée du haut Var – Alpes de Haute Provence

Alors que nous hésitons sur la direction à prendre à l’entrée de Nice, mon épouse de retour d’excursion à Antibes, nous aperçoit et nous fait signe. Qu’elle soit à Nice ne me surprend pas. Il était prévu qu’elle profite de la Diagonale pour rendre visite à son frère, niçois depuis peu. Mais qu’un tel hasard fasse que nous nous rencontrions est pour le moins surprenant ! Décidément, elle me piste…

Mon beau-frère s’arrête et nous guide un moment sur une grande artère pour nous permettre d’échapper à la pagaille du triathlon de Nice qui rassemble une foule considérable. Nous nous étions pourtant juré de l’éviter. Mais quand Francis veut, Francis fait … et avec lui nous bifurquons vers le bord de mer.

Sur la Promenade des anglais, les derniers compétiteurs de l’épreuve vélo arrivent. À peine ont-ils posé pied à terre, qu’ils repartent dans l’autre sens pour l’épreuve de course à pied.

Sans y prendre garde, nous progressons mélangés aux triathlètes et bientôt nous voilà canalisés par des barrières métalliques, derrière laquelle la foule se masse.

Nous franchissons la ligne d’arrivée. Une dame nous intime en anglais l’ordre de ranger nos vélos sur un parking voisin, mais lorsque nous lui indiquons notre destination, Menton, le service d’ordre nous ouvre une barrière.

Avec nos allures de champions fatigués, dépourvus de dossards, peinant à propulser nos montures lourdement chargées, les supporters devinent les triathlètes d’occasion égarés sur la ligne d’arrivée de L’Ironman.

Malgré notre méprise, beaucoup nous acclament. Le public sans doute autant impressionné par la plaque Brest/Menton que par l’âge des membres du trio nous encourage pour le final. Francis est heureux de son coup et nous aussi, il faut bien le dire.

La montée vers Èze par la moyenne corniche n’est maintenant qu’une simple formalité. Elle offre en prime des vues extraordinaires vers les villes de la côte.

Montée du col d’Èze avec pour panorama, la baie de Saint-Jean-Cap-Ferrat (Alpes- Maritimes)
La Turbie (Alpes-Maritimes). Dernier tampon pour l’un, dernières bières pour tous…
Brest est à 1380 km à peine et Menton est juste en bas !

Devant le panneau d’entrée de La Turbie Jean-Claude fait une rechute de « tamponite ». Il profite de l’arrêt pour nous offrir une dernière bière et fêter la réussite imminente de la seconde diagonale réalisée avec le même trio.

À notre arrivée au commissariat de Menton, nous sommes accueillis par Christian RAINEAU et un ami de Francis et alors que nous évoquons quelques moments de notre périple, je réalise qu’il faudra maintenant les ranger à la case des souvenirs heureux.

Brest- Menton, c’est fini. Dommage ! Nous commencions à nous habituer à pédaler.

Quelque part entre Brest et Menton, l’ami Jean-Claude se repose au pied de sa semi-remorque son vélo avant de repartir à la quête du tampon.

[1] Le rédacteur se nomme Gauthier

[2] Autre nom du col de la République (1161 m)

Au sommet de ce col se trouve une stèle dédiée à Paul DE VIVIES, plus connu sous le nom de Vélocio, pape du cyclotourisme à l’origine des « Diagonales de France »

[3] Cette maladie frappe les cyclotouristes. Les symptômes se manifestent par le besoin de se détourner vers un lieu répertorié par les adeptes du brevet des provinces françaises. Le remède : un coup de tampon authentifiant le détour permet de calmer temporairement le malade jusqu’à la prochaine crise. Les effets secondaires sont néanmoins bénéfiques car le malade peut retrouver une ardeur de pédalage insoupçonnable.

 

  Album photo de cette excursion

 




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